samedi 11 octobre 2008

Entre les murs

Une palme d'or sur un sujet si actuel, je dois dire que ça m'a étonnée. Alors, bien sûr, j'ai voulu aller le voir. Je n'ai d'ailleurs toujours pas compris la politique des cinémas de la ville d'Aix en Provence qui l'ont programmé dans le second cinéma de la ville (sur trois...) si bien que je m'y suis faite refoulér la semaine passée... salle pleine ! Bref...
Il est difficile de rassembler ses idées au sortir de ce film et en y réfélchissant, c'est peut-être bien ce qui fait sa force. C'est un film marquant au second degré. Pas de scène racolleuse, pas de scénario intrigant, juste une salle de classe qui vit durant une année... une des forces de ce film est peut-être qu'il invite à voir la réalité en cherchant à éviter les partis pris. A chacun de se faire une opinion et elles peuvent être très diverses. C'est probablement pour cela que seule la classe et le collège sont filmés. En dehors de François, le prof de français qui prend un café dans un troquet avant de démarrer son année, pas une image en dehors de l'établissement, donc pas une image non plus de la vie de ces élèves dans leur famille... et donc pas de clichés sur les "cités". J'ai apprécié.


Ce film donne à voir deux professions si je puis dire : celle de l'enseignant et celle de l'élève. Et comme fille d'enseignants ( père prof de français et mère prof de math en ZEP), j'ai plutôt porté mon regard sur ce que vivent les élèves aujourd'hui. Les prof, quelque part, je connaissais déjà plus ou moins. Et le film amène à mieux appréhender aujourd'hui la question de l'identité chez les jeunes. J'ai pour ma part évolué dans un collège puis lycée avec peu de mixité sociale, du moins telle qu'on l'entend aujourd'hui. J'entends par là que la plupart des élèves étaient français d'origine non immigrée et notre identité sociale était moins complexe à chercher que celle des jeunes de ce film. Le clivage bourgeois-non bourgeois existait bien sûr, mais cela s'arrêtait là. Le film de Laurent Cantet nous montre des jeunes qui cherchent leur identité en vivant avec d'autres jeunes de langue et culture différentes. C'est autrement plus riche, mais également autrement plus difficile à leur âge. Et cela induit une certaine violence verbale par désir probablement de protéger son idéntité fragilisée par cette mixité culturelle.

Le film met aussi l'accent sur la difficulté de transmettre aujourd'hui le savoir à des jeunes en proie à des questions annexes au contenu de l'enseignement, métaphysiques pourrais-je dire, qui les empêchent de se concentrer sur ce que l'enseignant cherche à leur transmettre. Ainsi, le film montre que l'élève, avant d'accepter la consigne ou le contenu de l'enseignement, discute du bien fondé de tel apprentissage, ou se concentre sur le prénom choisi par le professeur pour donner un simple exemple, plutôt que de s'intéresser à comprendre ce que cherche à faire comprendre le dit-exemple. On perçoit alors un grand décalage entre les centres d'intérêt et interrogations des élèves et les programmes d'enseignement en France. Cette difficulté est probablement majeure dans l'échec scolaire de certains jeunes aujourd'hui et le film met très bien en valeur cet aspect. Nous vivons dans un monde compliqué, instable, dont les problèmes familiaux sont très déstabilisants pour les enfants et le film montre bien à quel point les jeunes sont sur la défensive et dans le doute quant à ce que l'école tente de leur transmettre. La question est donc là et il faudrait un autre film pour commencer à ébaucher des réponses ou du moins essayer de circonscrire les phénomènes sociaux qui conduisent à de tels sentiments chez les jeunes.

Voilà, en vrac, quelques réflexions au sortir de ce film. Il me reste une question : "pourquoi a-t-il été primé dans un festival international comme Cannes?" Je précise ma pensée : le film, comme j'ai essayé de le montrer est vraiment bien réalisé et évite de nombreux écueils, il était donc censé être primé. Mais pourquoi par un jury international ? Je demeure étonnée qu'il ait intéressé un jury international, car il semble tellement typiquement français, que je pensais qu'il ne retiendrait pas l'attention d'un Sean Penn à ce point. Si quelqu'un a la réponse, les commentaires sont les bienvenus.

Sur ce, bonne séance !

Géraldine

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