mercredi 1 juillet 2009

Lesbos... c'est à dire ?

Hier, j’ai été invité à la Générale d’Orphée aux Enfers donné à l'occasion du Festival d'Aix en Provence. Opéra très étonnant par sa mise en scène qui joue beaucoup sur des anachronismes verbaux et gestuels. J’ai beau essayé de trouver les mots pour vous partager cette belle soirée, je ne les trouve pas. Ce qui signe d’ailleurs la réussite de la mise en scène, puisque mon manque de mots renvoie à une expérience sensorielle et émotionnelle…

Néanmoins, je me suis demandée en lien avec l’opéra, ce que signifiait Lesbos. Je vous livre le fruit de mes recherches…

Lesbos, nous dit mythorama, est une île grecque en mer Égée. Le héros Lesbos lui donna son nom. La tradition veut que grande lyre y fut inventée. Elle est aussi la capitale de la poésie lyrique au VII et VI siècles av. J.-C avec le poète Alcée et la poétesse Sappho.

Wikipedia ajoute que le terme de lesbienne découle de la poésie de Sappho, qui est née à Lesbos. Ses poèmes, au contenu émotionnel puissant orienté vers les autres femmes, ont souvent été interprétée comme exprimant l'amour homosexuel.

Je vous laisse maintenant découvrir la poésie que Lesbos inspira à Baudelaire…

Mère des jeux latins et des voluptés grecques,

Lesbos, où les baisers languissants ou joyeux,

Chauds comme les soleils, frais comme les pastèques,

Font l'ornement des nuits et des jours glorieux,

Mère des jeux latins et des voluptés grecques,


Lesbos, où les baisers sont comme les cascades

Qui se jettent sans peur dans les gouffres sans fonds

Et courent, sanglotant et gloussant par saccades,

Orageux et secrets, fourmillants et profonds ;
Lesbos, où les baisers sont comme les cascades !


Lesbos où les Phrynés l'une l'autre s'attirent,

Où jamais un soupir ne resta sans écho,

À l'égal de Paphos les étoiles t'admirent,

Et Vénus à bon droit peut jalouser Sapho !

Lesbos où les Phrynés l'une l'autre s'attirent,


Lesbos, terre des nuits chaudes et langoureuses,

Qui font qu'à leurs miroirs, stérile volupté,

Les filles aux yeux creux, de leurs corps amoureuses,

Caressent les fruits mûrs de leur nubilité,

Lesbos, terre des nuits chaudes et langoureuses,


Laisse du vieux Platon se froncer l'œil austère ;

Tu tires ton pardon de l'excès des baisers,

Reine du doux empire, aimable et noble terre,

Et des raffinements toujours inépuisés.

Laisse du vieux Platon se froncer l'œil austère.


Tu tires ton pardon de l'éternel martyre

Infligé sans relâche aux cœurs ambitieux

Qu'attire loin de nous le radieux sourire

Entrevu vaguement au bord des autres cieux ;

Tu tires ton pardon de l'éternel martyre !


Qui des Dieux osera, Lesbos, être ton juge,

Et condamner ton front pâli dans les travaux,

Si ses balances d'or n'ont pesé le déluge

De larmes qu'à la mer ont versé tes ruisseaux ?

Qui des Dieux osera, Lesbos, être ton juge ?


Que nous veulent les lois du juste et de l'injuste ?

Vierges au cœur sublime, honneur de l'archipel,

Votre religion comme une autre est auguste,

Et l'amour se rira de l'enfer et du ciel !

Que nous veulent les lois du juste et de l'injuste ?


Car Lesbos entre tous m'a choisi sur la terre

Pour chanter le secret de ses vierges en fleur,

Et je fus dès l'enfance admis au noir mystère

Des rires effrénés mêlés au sombre pleur ;

Car Lesbos entre tous m'a choisi sur la terre,


Et depuis lors je veille au sommet de Leucate,

Comme une sentinelle, à l'œil perçant et sûr,

Qui guette nuit et jour brick, tartane ou frégate,

Dont les formes au loin frissonnent dans l'azur,

Et depuis lors je veille au sommet de Leucate


Pour savoir si la mer est indulgente et bonne,

Et parmi les sanglots dont le roc retentit

Un soir ramènera vers Lesbos qui pardonne

Le cadavre adoré de Sapho qui partit

Pour savoir si la mer est indulgente et bonne !


De la mâle Sapho, l'amante et le poète,

Plus belle que Vénus par ses mornes pâleurs !

L'œil d'azur est vaincu par l'œil noir que tachète

Le cercle ténébreux tracé par les douleurs

De la mâle Sapho, l'amante et le poète !


Plus belle que Vénus se dressant sur le monde

Et versant les trésors de sa sérénité

Et le rayonnement de sa jeunesse blonde

Sur le vieil Océan de sa fille enchanté ;

Plus belle que Vénus se dressant sur le monde !


De Sapho qui mourut le jour de son blasphème,

Quand, insultant le rite et le culte inventé,

Elle fit son beau corps la pâture suprême

D'un brutal dont l'orgueil punit l'impiété

De Sapho qui mourut le jour de son blasphème.


Et c'est depuis ce temps que Lesbos se lamente,

Et, malgré les honneurs que lui rend l'univers,

S'enivre chaque nuit du cri de la tourmente

Que poussent vers les cieux ses rivages déserts.

Et c'est depuis ce temps que Lesbos se lamente !


les Fleurs du mal - LXXX LESBOS


Belle journée ensoleillée…


Géraldine

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