C'est le dernier ouvrage du psychiatre-psychanalyste-sociologue Serge Tisseron "virtuel mon amour" qui m'a inspiré aujourd'hui. Je n'ai pas encore eu l'opportunité de lire cet ouvrage, mais pour avoir lu d'autres ouvrages, je sais qu'il est pertinent Tisseron.
C'est curieux d'avoir l'info de ce livre ce matin, car hier soir, j'étais devant mon ordinateur et tout à coup j'ai eu envie de le balancer par la fenêtre. Ras le bol de cette communication par "bit" interposé, ras le bol de ces contacts à distance. J'étais en effet en train de chercher un forum de psycho sur le site de l'IED, organisme de formation à distance, dont je fais partie. Et j'ai accédé, presque par hasard, à mon "profil". Cette situation m'a fait repenser aux joies de Facebook. Que faire? Je me suis contentée d'y enregistrer ma photo, mais pas un mot de plus. Je ne connais presque aucun étudiant. Je n'ai donc pas envie de me livrer. Et puis qu'est-ce que c'est que cette communication à l'envers? Dans la communication réelle, ce qu'on donne à voir est dynamique : des vêtements renouvelés quotidiennement, en outre, c'est l'interaction avec l'autre qui va déclencher chez moi l'envie de livrer tel trait de ma personnalité ou non. C'est la confiance qui est en jeu, un peu la sensualité aussi, le jeu qui se joue en direct avec l'autre au moment de l'échange.
Mais avec tous ces fichus profils internet, la vie devient statique - donc meurt ! Prenez par exemple cette photo (la même que celle de mon profil blogger) : elle a été prise l'an passée en mai aolrs que j'entrais pour la première fois dans mon nouvel appartement. Cet événement a suscité en moi des sentiments et émotions, qui sont imprimés sur cette photo et qui n'ont rien à voir avec moi en cette fin de matinée ! Entre temps, il peut s'être passé 20 mille trucs dans cet appart qui ont pour conséquence le fait qu'il m'insupporte, par exemple !
Quant aux autres infos qu'on livre dans un profil, c'est du statique une fois encore, avec l'impossibilité de gérer la distance qui varie en fonction de l'interlocuteur. Reprenons l'exemple du profil de l'IED. Ai-je envie de partager avec mes profs et le directeur mon sport préféré, ma musique préférée, que sais-je encore? Non ! Pourtant, l'info est livrée "brute" à tous les membres de l'IED. Quant aux étudiants, il y en a certains que j'apprécie beaucoup et d'autres qui me refroidissent absolument. A ceux-là non plus, je n'ai pas envie de livrer ce type d'infos !
Bref, ces histoires de profil Internet qui semblent incontournables à l'outil informatique produisent de la désinformation ! Désinformation car les éléments proposés, en dehors de toute dynamique de l'interaction languagière brouillent le message adressé à l'autre. Dans une conversation à baton rompu, je ne vais pas livrer tous mes éléments perso en 3 secondes, ils vont être révélés selon ce que l'autre me demande, implicitement ou explicitement et selon ce que j'ai moi, envie de répondre. Et c'est le fil de cette interaction qui fait que l'autre va pouvoir se faire une "idée" de moi-même. Tiens, d'ailleurs, il y a un glissement sémantique : on passe d'"idée" à "profil"...
Allez, trêve de discours monologique ! Puissent ces quelques mots avoir au moins suscité en vous une réflexion que la lecture de Serge Tisseron pourra aider et je n'aurai pas perdu ma journée !
Géraldine