dimanche 14 octobre 2007

Hitomi Kanehara Serpents et piercings.

Amis lecteurs, bonsoir.

une fois encore, mon ami F nous fait partager ses impressions d'une nouvelle oeuvre, qui intéressera (lorsque j'aurai le temps de lire...) l'élève psychologue que je suis, à ce que j'ai pu comprendre des lignes qui suivent. Merci à toi pour ta critique !

Mais je te laisse la parole...

Géraldine

Hitomi Kanehara Serpents et piercings. 163 pages.

Serpents et piercings’ de Hitomi Kanehara n’est pas de ces livres insipides que l’on avale d’un coup.

Tout d’abord parce que dérive volontaire et pulsion de mort sont assez rarement décrits comme moteurs de vie. Et ce paradoxe laisse rêveur…

Puis ensuite parce que l’on y ajoute la notion de communauté de transformation corporelle comme leitmotive, de sexe et de violence comme piliers d’affirmation, on ne peut que rester bouche bée devant l’incompréhension de certains Japonais face à leur propre société.

On ne peut donc avaler complètement cet ouvrage sans l’avoir mâché, et si on veut en prendre le temps, ruminé.

Dans ces 163 pages trop avidement englouties, on va retrouver :

- Une approche de la mort assez particulière mais non unique : celle là même dont Murakami Ryù nous affuble dans ‘Bleu presque transparent’, c'est-à-dire la mort comme but ultime, à travers une déchéance qui à la pureté du bleu.

- Un objectif de mortification qui sourd, gronde et suinte à travers chacun des gestes des trois héros de ‘Serpents et piercings’, à l’image de celle que l’on a pu palper dans ‘Ectasy’ (Murikami Ryû).

- Une dimension d’éternité que l’on ne pourrait guère retrouver que chez Haruki Murakami dans ses ‘Chroniques de l’oiseau à ressort’, dans ‘Danse, danse, danse’, ou mieux encore dans ‘La fin des temps’.

Car seuls à ma connaissance les auteurs Japonais ont su retranscrire ce mal-être, cette scission entre des punk réduits à se marginaliser pour combattre l’indifférence d’une population bien trop réglée et rangée.

Chez Haruki Murakami, et oui, encore lui… (dans ‘Les amants du Spoutnik’, mais aussi dans ‘La guerre commence au-delà de la mer’), on va retrouver l’insoutenable interaction entre deux êtres perdus qui se disputent une proie consentante.

Jusqu’à quelle folie la passion amoureuse de Shiba-San pour Liu le poussera t’elle ? Ce sentiment d’amour extrême -de ou pour- une femme-enfant ingénue, nous l’avons également côtoyé chez Junichirô Tanizaki (Le meurtre d’O-Tsuya).

Cette échappatoire vers la mort comme ultime solution que veut ‘vivre’ Liu, Matsumoto nous l’avait fait découvrir dans ‘Tokyo express’.

Ce décalage entre des sentiments banals provoqués par l’amour et l’extrémisme de la chair torturée d’Ama, entre une ascendance on ne peut plus ‘normale’ et la frénésie d’indépendance et du remarquable, Yukio Mishima nous l’avait dévoilé dans ‘L’école de la chair’.

Bref, ce roman narratif est une opération à cœur ouvert sur des tragédies issues de dualités d’extrêmes, alors que paraît en filigrane une ville de Tokyo oppressante et triste, écrasée par un soleil caniculaire.

C’est à ce jour le seul ouvrage qui m'ait fait réfléchir sur la complexité des rapports entre l’amour et la mort.

2 commentaires:

sansan a dit…

bonjour Géraldine, merci de me faire découvrir ce livre....je suis friande de littérature japonnaise.Je viens recemment de lire "les bébés de la consigne automatique" de Mirakami Ryû et "pénis d'orteil" de Rieko Matsuura .

a dit…

Chère Sansan, je suis ravie de ton message et je sais qu'il va faire grand plaisir à mon ami F qui écrit ces critiques pour le plaisir de tous !

Bonne lecture à toi !

Géraldine