Bonne lecture... et bonne fête de la Saint Valentin !
Géraldine
Eloge de la drague par Delphine Peras
Article publié dans l'Express du 11 février 2008
«Les règles du jeu ont changé», clame la baseline de Meetic. Vraiment? A force de conjuguer le désir au plus-que-parfait d'Internet, à force de ne jurer que par le virtuel, personne n'a vu venir un nouveau phénomène: le grand retour de la drague. Dans le rôle de l'entremetteur providentiel, le Vélib' est tombé à pic. Grâce à lui, Stéphanie, 32 ans, graphiste et célibataire, a retrouvé le goût de la rencontre imprévue. Et la possibilité de juger «sur pièces»: «On sait tout de suite à qui on a affaire, au moins physiquement. Il est très facile d'engager la discussion devant la borne, au prétexte de s'échanger des conseils. On peut ensuite finir devant un verre dans le café le plus proche ou bien se donner rendez-vous!» Pour mieux annoncer la couleur, des jolis cœurs ont collé des autocollants «Love can begin here» sur le feu arrière des fameuses bicyclettes grises. Autre prétexte, l'interdiction de fumer, qui s'est aussi révélée être une aubaine pour ces amoureux en mal de spontanéité, avec une nouvelle tendance baptisée «smirting», contraction de smokinget de flirting, et venue d'Irlande, premier pays européen à avoir interdit la cigarette dans les pubs et les restaurants. «Se retrouver à fumer sur le trottoir, c'est idéal pour séduire en toute légèreté», assure Martin, un traderde 28 ans. «Il suffit d'avoir "oublié" son briquet au bureau pour établir le contact et, si ce n'est pas la passion, on retourne naturellement travailler une fois sa cigarette terminée.» Du coup de foudre cycliste à la drague en volutes, nos trois bonnes raisons de renouer avec l'art de la séduction.
«Les règles du jeu ont changé», clame la baseline de Meetic. Vraiment? A force de conjuguer le désir au plus-que-parfait d'Internet, à force de ne jurer que par le virtuel, personne n'a vu venir un nouveau phénomène: le grand retour de la drague. Dans le rôle de l'entremetteur providentiel, le Vélib' est tombé à pic. Grâce à lui, Stéphanie, 32 ans, graphiste et célibataire, a retrouvé le goût de la rencontre imprévue. Et la possibilité de juger «sur pièces»: «On sait tout de suite à qui on a affaire, au moins physiquement. Il est très facile d'engager la discussion devant la borne, au prétexte de s'échanger des conseils. On peut ensuite finir devant un verre dans le café le plus proche ou bien se donner rendez-vous!» Pour mieux annoncer la couleur, des jolis cœurs ont collé des autocollants «Love can begin here» sur le feu arrière des fameuses bicyclettes grises. Autre prétexte, l'interdiction de fumer, qui s'est aussi révélée être une aubaine pour ces amoureux en mal de spontanéité, avec une nouvelle tendance baptisée «smirting», contraction de smokinget de flirting, et venue d'Irlande, premier pays européen à avoir interdit la cigarette dans les pubs et les restaurants. «Se retrouver à fumer sur le trottoir, c'est idéal pour séduire en toute légèreté», assure Martin, un traderde 28 ans. «Il suffit d'avoir "oublié" son briquet au bureau pour établir le contact et, si ce n'est pas la passion, on retourne naturellement travailler une fois sa cigarette terminée.» Du coup de foudre cycliste à la drague en volutes, nos trois bonnes raisons de renouer avec l'art de la séduction.
En finir avec le fantasme du partenaire idéal
La séduction sur Internet projette dans un monde virtuel stimulant intellectuellement mais très frustrant physiquement», témoigne Charlotte, une architecte parisienne de 38 ans. Divorcée, hyperactive, cette mère de deux enfants a cru pouvoir gagner du temps en s'inscrivant sur Meetic. Las, le moment de la rencontre est chaque fois devenu synonyme de déconvenue, pour ne pas dire de choc. «J'étais dans le fantasme, j'avais toujours affaire à un partenaire qui me plaisait pour son esprit, sa culture, son humour. Mais je lui attribuais un physique imaginaire qui ne correspondait évidemment pas à la réalité.» Difficile après ça de surmonter sa déception et d'être réceptive au charme naturel de son prétendant. «Internet n'a fait que donner de l'ampleur à la technique très ancienne des petites annonces, où le lien se développait sur des bases totalement illusoires», souligne Jean-Claude Bologne, auteur d'un essai formidable sur l'Histoire de la conquête amoureuse. De l'Antiquité à nos jours(Seuil). Et l'époque n'aide pas à dissiper le mensonge du virtuel. «Dans une société aussi individualiste que la nôtre, se confronter au regard de l'autre est devenu difficile, ajoute le psychiatre Serge Hefez, qui vient de publier Dans le cœur des hommes (Hachette Littératures). Nous sommes inquiets de notre image et craignons sans cesse qu'elle ne soit jugée, voire rejetée. Internet constitue un filtre, un amortisseur. Et c'est la quadrature du cercle: plus on essuie d'échecs à distance, moins on est armé pour affronter le réel et plus on se rassure devant l'immensité du choix qu'offre la Toile.»
La séduction sur Internet projette dans un monde virtuel stimulant intellectuellement mais très frustrant physiquement», témoigne Charlotte, une architecte parisienne de 38 ans. Divorcée, hyperactive, cette mère de deux enfants a cru pouvoir gagner du temps en s'inscrivant sur Meetic. Las, le moment de la rencontre est chaque fois devenu synonyme de déconvenue, pour ne pas dire de choc. «J'étais dans le fantasme, j'avais toujours affaire à un partenaire qui me plaisait pour son esprit, sa culture, son humour. Mais je lui attribuais un physique imaginaire qui ne correspondait évidemment pas à la réalité.» Difficile après ça de surmonter sa déception et d'être réceptive au charme naturel de son prétendant. «Internet n'a fait que donner de l'ampleur à la technique très ancienne des petites annonces, où le lien se développait sur des bases totalement illusoires», souligne Jean-Claude Bologne, auteur d'un essai formidable sur l'Histoire de la conquête amoureuse. De l'Antiquité à nos jours(Seuil). Et l'époque n'aide pas à dissiper le mensonge du virtuel. «Dans une société aussi individualiste que la nôtre, se confronter au regard de l'autre est devenu difficile, ajoute le psychiatre Serge Hefez, qui vient de publier Dans le cœur des hommes (Hachette Littératures). Nous sommes inquiets de notre image et craignons sans cesse qu'elle ne soit jugée, voire rejetée. Internet constitue un filtre, un amortisseur. Et c'est la quadrature du cercle: plus on essuie d'échecs à distance, moins on est armé pour affronter le réel et plus on se rassure devant l'immensité du choix qu'offre la Toile.»
Retrouver la part d'animalité qui est en nous
Eh oui, on l'oubliait presque: le corps a son mot à dire quand il s'agit de trouver l'âme sœur! «La drague, dans sa dimension physique, est très animale, rappelle la neurobiologiste Lucy Vincent, auteure de Où est passé l'amour? (Odile Jacob). Elle active notre cerveau inconscient, qui décortique des indices tels que les odeurs, la forme du visage, la couleur des cheveux... Beaucoup de messages sexuels sont également véhiculés par la voix. Ainsi, les femmes sont naturellement sensibles à une voix masculine grave, qui témoigne d'un taux élevé de testostérone.» Jacques, un prof de 36 ans, également revenu de Meetic, en est convaincu: «Rien ne remplace la rencontre physique. C'est le seul moyen d'appréhender l'autre dans sa totalité, intellectuellement et instinctivement. On sait tout de suite si le courant peut passer, on découvre qu'on aime son parfum, son rire, ses mimiques. Après, on peut tester une complicité plus cérébrale. Ou non.»
Eh oui, on l'oubliait presque: le corps a son mot à dire quand il s'agit de trouver l'âme sœur! «La drague, dans sa dimension physique, est très animale, rappelle la neurobiologiste Lucy Vincent, auteure de Où est passé l'amour? (Odile Jacob). Elle active notre cerveau inconscient, qui décortique des indices tels que les odeurs, la forme du visage, la couleur des cheveux... Beaucoup de messages sexuels sont également véhiculés par la voix. Ainsi, les femmes sont naturellement sensibles à une voix masculine grave, qui témoigne d'un taux élevé de testostérone.» Jacques, un prof de 36 ans, également revenu de Meetic, en est convaincu: «Rien ne remplace la rencontre physique. C'est le seul moyen d'appréhender l'autre dans sa totalité, intellectuellement et instinctivement. On sait tout de suite si le courant peut passer, on découvre qu'on aime son parfum, son rire, ses mimiques. Après, on peut tester une complicité plus cérébrale. Ou non.»
Renouer avec le plaisir de la séduction
C'est dire s'il faut en profiter! D'autant que s'exposer à la rencontre physique spontanée, imprévue, c'est la promesse d'émotions intenses dès le premier échange de regards; quand les mains deviennent moites à la seule vue d'un décolleté troublant... Voilà des préliminaires autrement plus prometteurs que la présentation de son CV et la description de ses hobbys, préalable obligé à tout échange sur le Net! Certes, se jeter ainsi dans l'inconnu, c'est prendre le risque de... subir un revers. Mais revenir à cette façon de séduire est finalement l'occasion de prendre soin de son allure au quotidien, et non plus de se mettre en frais exceptionnellement pour un rendez-vous précis, après des heures de tchat en tenue débraillée derrière son PC. Evidemment, les codes de la séduction ont changé. «Ils sont plus flous et plus contradictoires qu'autrefois, constate le psychiatre Serge Hefez. C'est devenu compliqué, surtout pour les hommes: ils ne doivent pas se montrer trop machos mais doivent rester dans une affirmation masculine, de sorte que la femme se sente désirée. Pour ce qui la concerne, on s'attend à ce qu'elle soit plus active que par le passé, mais sans pour autant donner à l'homme l'impression d'être dominé.» Pas de quoi affadir, comme peut le faire Internet, l'intensité du jeu amoureux. Si l'on reste sur cette ligne de partage, plein de choses sont possibles, selon Serge Hefez: «Il faut donner à l'autre le sentiment d'être à la fois libre et choisi.» La séduction se nourrit ainsi des vraies qualités de chacun, gage d'un amour épanouissant... et bien réel!
C'est dire s'il faut en profiter! D'autant que s'exposer à la rencontre physique spontanée, imprévue, c'est la promesse d'émotions intenses dès le premier échange de regards; quand les mains deviennent moites à la seule vue d'un décolleté troublant... Voilà des préliminaires autrement plus prometteurs que la présentation de son CV et la description de ses hobbys, préalable obligé à tout échange sur le Net! Certes, se jeter ainsi dans l'inconnu, c'est prendre le risque de... subir un revers. Mais revenir à cette façon de séduire est finalement l'occasion de prendre soin de son allure au quotidien, et non plus de se mettre en frais exceptionnellement pour un rendez-vous précis, après des heures de tchat en tenue débraillée derrière son PC. Evidemment, les codes de la séduction ont changé. «Ils sont plus flous et plus contradictoires qu'autrefois, constate le psychiatre Serge Hefez. C'est devenu compliqué, surtout pour les hommes: ils ne doivent pas se montrer trop machos mais doivent rester dans une affirmation masculine, de sorte que la femme se sente désirée. Pour ce qui la concerne, on s'attend à ce qu'elle soit plus active que par le passé, mais sans pour autant donner à l'homme l'impression d'être dominé.» Pas de quoi affadir, comme peut le faire Internet, l'intensité du jeu amoureux. Si l'on reste sur cette ligne de partage, plein de choses sont possibles, selon Serge Hefez: «Il faut donner à l'autre le sentiment d'être à la fois libre et choisi.» La séduction se nourrit ainsi des vraies qualités de chacun, gage d'un amour épanouissant... et bien réel!
Alors ? Prêt(e) à lacher vos claviers, écrans, et vous jeter à l'eau ?